Les années se suivent mais ne se ressemblent décidément pas. C’est une évidence, certes, mais pas inintéressante à rappeler. Et c’est peut-être même dans cette inconstance des millésimes que se niche aussi l’une des conséquences de ce changement climatique : une grande variation dans les épisodes climatiques d’une semaine à l’autre, mais également une grande disparité des phénomènes observés d’une année sur l’autre. En Californie, 2023 est une année exceptionnelle, une année idéale, qu’on rencontre de moins en moins souvent. Alors on savoure.
Le tableau climatique est homogène en Californie : un hiver assez pluvieux, un printemps sec et doux, plutôt frais jusqu’au mois de mai, ponctué par des petites pluies qui constituent une réserve en eau extrêmement utile dans la région. L’été se poursuit dans une ambiance modérée : la région ne connaît que 2 jours de pics de chaleur au-delà de 35°C. Les vignerons revoient ainsi leur effeuillage pour s’assurer d’une maturation optimale des raisins ! C’est un contexte climatique d’une grande constance, qui en fait l’un des millésimes les plus stables, modérés, et frais de ces deux dernières décennies.
En l’absence de pluie menaçante, les vendanges surviennent tardivement (5 semaines après la récolte du millésime 2022) et s’étirent considérablement : on commence à ramasser les blancs le 7 septembre, et les premiers cabernets le 10 octobre. Une pluie très fine (entre 12 et 20 mm selon les zones) assouplit idéalement les peaux des cabernets à la bonne période, comme un signe divin.
Les vinifications se déroulent sans ombre : les matières s’extraient très facilement, les macérations sont longues (les levures indigènes ont joué leur rôle et ont ralenti la fermentation et l’extractibilité), à des températures autour de 28-30°C, pour une cuvaison de 18 à 23 jours. Les fermentations se sont déroulées sans aucun problème microbien.
A ce stade, on obtient des jus harmonieux, avec des pH très équilibrés (3.6 à 3.8), et une grande intensité aromatique ; les vins sont denses, puissants, tenus.
Ce 2023 ressemble décidément à un millésime de l’ère du « pré changement climatique » : on a observé une courbe de maturité régulière, une accumulation des sucres lents qui protègent de l’acidité, une maturité acquise lentement et progressivement, non sans rappeler les millésimes d’autrefois qui, de fait, se font de plus en plus rares.